A Berne, Genève doit redorer son blason

  • Le Conseil d’Etat genevois est monté au grand complet au Palais fédéral, mardi 8 juin.
  • Le gouvernement a déposé le projet d’agglomération franco-valdo-genevois, quatrième génération.
  • Nos parlementaires passent au crible cette opération de séduction. Pour eux, Genève a un gros retard à rattraper à Berne.

  • BERTSCHY

C’est un peu la course d’école du Conseil d’Etat. Mardi 8 juin, le collège au grand complet a débarqué à Berne. Objectif affiché: déposer le Projet d’agglomération 4 (PA4, lire encadré). Mais aussi, voire surtout, redorer le blason de Genève dans la capitale. Que pensent les conseillers aux Etats et conseillers nationaux (CN) de cette opération séduction?

Lisa Mazzone, conseillère aux Etats (Verts): «Cela vaut toujours la peine! Nous avons été pas mal égratignés par cette période de crise institutionnelle. Les médias suisses alémaniques ne parlaient de Genève que sur l’affaire Maudet. Cela a marqué les esprits de nos collègues. Il est important que le Conseil d’Etat essaie de redémarrer sur de nouvelles bases.»

Carlo Sommaruga, conseiller aux Etats (PS): «Le message est double. D’une part, à la population genevoise pour lui montrer l’importance de ce projet d’agglomération. D’autre part, aux autorités fédérales pour souligner le poids politique de ce dossier. D’autant plus que par le passé, on a eu des soucis de délai de mise en œuvre de ces projets d’agglomération. Il est important de placer ce PA4 sous les meilleurs auspices.»

Céline Amaudruz, CN (UDC): «Enfin! Mais, cela ne devrait pas être exceptionnel. Ce n’est pas en venant une fois que l’exécutif peut changer l’image que les gens ont de Genève. Entre l’affaire Maudet, les cartes de crédit utilisées à mauvais escient et maintenant les bulletins de vote… Aujourd’hui, on n’a plus de crédibilité à Berne.»

Christian Dandrès, CN (PS): «Je pense surtout au rôle précurseur de Genève en matière d’assurance maternité cantonale ainsi qu’en matière de logement et de protection des locataires. Parfois, les modestes avancées genevoises servent d’inspiration.»

Simone de Montmollin, CN (PLR): «Il est important que Genève montre son attachement au fédéralisme. Notre canton fait partie de la Suisse même s’il est éloigné géographiquement et linguistiquement. De plus, le projet d’agglomération 4 souligne qu’il faut poursuivre la collaboration transfrontalière car nous partageons une communauté de destin également avec la France voisine.»

Laurence Fehlmann Rielle, CN (PS): «Il est très important que le Conseil d’Etat fasse le déplacement pour défendre le projet d’agglomération qui est indispensable au bon fonctionnement de notre région. La relation constructive avec la France voisine avec laquelle nous formons une communauté d’intérêts prend encore plus de sens au moment où l’accord-cadre [entre la Suisse et l’Union européenne] a été enterré.»

Delphine Klopfenstein Broggini, CN (Verts): «Cette visite du Conseil d’Etat qui porte des dossiers importants en termes de mobilité est réjouissante. La piétonnisation autour de la gare Cornavin et les deux projets de trams transfrontaliers sont des engagements essentiels pour apaiser le trafic motorisé et réduire nos émissions de CO2. Genève doit obtenir un soutien de Berne.»

Christian Lüscher, CN (PLR): «L’image de Genève à Berne a été sérieusement écornée. Même en dehors de «l’affaire», Genève est vue dans le reste de la Suisse comme un canton incapable de maîtriser ses finances et avec une fonction publique boursouflée. Cette visite montre que Genève se soucie de ses rapports avec la Confédération et qu’elle est consciente que nombre de problèmes genevois se règlent à Berne.»

Vincent Maitre, CN (Le Centre): «Genève défend mal son bout de gras à Berne. Peut-être est-ce pour cela, par exemple, que nous avons perdu la RTS au profit de Lausanne. Genève est décrédibilisée sous la coupole fédérale à la moindre Genferei. Il faut absolument mieux faire connaître les atouts de notre canton. Pour cela, il faut intensifier ces visites.»

Michel Matter, CN (Vert’libéral): «Au-delà des partis, nous devons pouvoir échanger avec le Conseil d’Etat in corpore selon nos sensibilités et visions du futur cantonal et national. Avec un but commun: porter et défendre notre canton, notre ville et la Genève internationale. Nous restons une ville de Genferei. Ce particularisme ou microcosme genevois reste pour de nombreux parlementaires une totale incompréhension.»

Yves Nidegger, CN (UDC): «Quelle que puisse être la coresponsabilité de la Poste, l’affaire des 7000 bulletins de vote abandonnés trois jours dans la nature est perçue, ici, comme une énième Genferei. Le timing de l’apparition (rarissime) du Conseil d’Etat à Berne est donc particulièrement mauvais. Enfin, je n’ai aucune intention de figurer sur la photo d’une mise en scène à la gloire de l’agglomération franco-valdo-genevoise!»

Isabelle Pasquier-Eichenberger, CN (Verts): «Je trouve très positif que le Conseil d’Etat in corpore se déplace pour remettre son projet d’agglomération 4. Ces projets sont essentiels, car ils définissent les futures infrastructures de notre région. Le Conseil d’Etat montre ainsi qu’il s’investira pour ce projet et je m’en réjouis.»

Stefania Prezioso Batou, CN (Ensemble à gauche): «En tant qu’élue représentant les classes populaires de Genève et non sa place financière, j’espère que ce Conseil d’Etat à majorité de gauche qui se déplace à Berne le 8 juin, un jour avant que le dossier AVS21 n’arrive au national, plaidera énergiquement contre à la veille de la grève du 14 juin.»

Nicolas Walder, CN (Verts): «La présence in corpore du Conseil d’Etat envoie un signal fort: Berne est importante pour Genève! Ce qui ne peut qu’améliorer notre image encore trop souvent considérée comme hautaine. Au vu des nombreux enjeux pour Genève (lutte contre la crise climatique, financement des infrastructures, migration…), cette visite ne peut être que bénéfique. C’est aussi l’occasion de demander à Berne un engagement fort pour soutenir la Genève internationale en période post-Covid-19.»

Projet d’agglomération de 520 millions

Le Projet d’agglomération 4 (PA4) réunit 23 projets d’infrastructures, parmi lesquels des mesures en lien avec l’extension de la gare Cornavin, le prolongement du tram Nations Grand-Saconnex jusqu’à Ferney-Voltaire et celui du tram d’Annemasse. S’ajoutent 28 mesures liées à la mobilité douce ou encore à la gestion du trafic. Le tout est prévu sur 2024-2027.

Le montant global atteint 520,8 millions de francs, pour lesquels les partenaires franco-valdo-genevois sollicitent la participation de la Confédération.

Le but, selon les mots du conseiller d’Etat genevois Antonio Hodgers: «Mettre de la cohérence, faire du lien.» Les trois précédents projets d’agglomération ont déjà permis de réaliser 82 mesures. Berne ayant participé à hauteur de 500 millions de francs. De quoi faire dire à la conseillère d’Etat vaudoise, Christelle Luisier Brodard: «On n’est pas dans le bla-bla, on est dans le concret!»