Le climat vaut bien une messe, non?

Ils étaient sept magistrats, comme sept célébrants, dans la cathédrale mondiale de la météo, pour nous chanter les vertus du «Plan climat cantonal». Une conférence de presse? Non, une grand-messe.

  • L’urgence climatique se définit aux horizons 2030, 2050. Pour la crise sociale, les jeunes

    L’urgence climatique se définit aux horizons 2030, 2050. Pour la crise sociale, les jeunes perspective, les rentes malingres des retraités, nous verrons plus tard. 123RF

In corpore. Le Conseil d’Etat s’est présenté au grand complet, mercredi 2 juin 2021, pour nous parler climat. Les sept magistrats étaient certes en civil, mais des chasubles eussent peut-être été d’usage, et pourquoi pas quelques vapeurs d’encens, les grandes orgues, les petites fugues de Bach, la majesté du latin, pour montrer que c’était du lourd. D’ailleurs, le gouvernement de la République et Canton de Genève n’était pas chez lui, ce jour-là. Pour l’occasion, il avait déserté l’austérité patricienne de la Vieille-Ville pour se rendre à l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Histoire d’en rajouter dans l’ordre de la symbolique, au cas où tous n’auraient pas été pénétrés par la gravité de cette apparition de sept cassandres tutoyant la fin du monde. Bref, le Conseil d’Etat, ce jour-là, a mis le paquet.

Horizon 2030, voire 2050

Il s’agissait de nous présenter le «Plan climat cantonal 2030». Vous avez remarqué? Tout, ces temps, se définit à l’horizon 2030. Et si, par hasard, on estime en haut lieu, dans les nimbes météorologiques du pouvoir, que le délai est un peu serré, alors peu importe, on le repousse à 2050. Nous avons, en Suisse, une crise sociale, liée à la crise sanitaire, nous avons des jeunes sans emploi, ni perspectives. Nous avons des retraités qui rament pour cause de rentes malingres. Nous avons des livreurs qui deviennent cinglés dans les bouchons. Mais non, la politique, elle, se définit aux horizons 2030, 2050. On voit plus loin que royaume des presbytes, on jette son regard vers les horizons perdus, à nous l’avenir. Pour le présent, nous verrons plus tard.

Nos péchés

Ce mercredi 2 juin donc, l’exécutif in corpore. La grand-messe. Liturgie, prières, psaumes, sans oublier le sermon. Mieux encore: la secrétaire générale adjointe de l’OMM a droit au discours d’introduction. Elle entre en matière sur le fond, adoube d’avance les options climatiques du Conseil d’Etat: lorsqu’on parle du bien, on évite d’en dire du mal. Et puis, après quelques minutes, l’éminente fonctionnaire internationale daigne «donner la parole» au président du Conseil d’Etat. Lequel, docile, bien obédient à l’instance mondialiste qui l’accueille, entame le long confiteor de tous nos péchés qu’il va s’agir, d’ici à 2030 (ou 2050, si on prend quelque retard), de laver. Après tout, quand il s’agit de se délivrer du mal, on n’est pas à vingt ans près. Je vous passe le détail purgatoire, le chemin de croix de la dépollution, la rédemption par la taxe, version moderne de l’indulgence, à l’époque de Luther.

Piste cyclable enchantée

Bref, on nous promet du sang et des larmes, et même pas un petit cigare churchillien pour tenir le coup. Allons, pèlerins, cheminons. Chassons de nos vies la diabolique voiture. Que la piste cyclable soit notre route enchantée, notre voie lactée pour enfin fréquenter les anges. Tout cela valait bien un septuor, non? Un gouvernement décentralisé au paradis du soleil et des nuages, avec le dieu Mercure comme messager de nos songes. Ce mercredi-là, la messe était parfaite. Quant à la quête, vous la retrouverez bientôt. Sous la forme rédemptrice de taxes et d’impôts. Que du bonheur. Ah, un détail encore: demain, il fera beau. Demain, toujours demain.