Le musée de la BD se dessine à Genève

Le neuvième art va enfin disposer d’un lieu d’exposition dans le canton. Ce sera à la Villa Sarasin, au Grand-Saconnex. La bande dessinée est née à Genève grâce à Rodolphe Töpffer, qui crée ses histoires en images dès 1827. Le futur musée fera le lien entre ce patrimoine et les auteurs contemporains. Explications.

  • La Villa Sarasin, située à deux pas de Palexpo, abritera le futur musée. MP

  • La Villa Sarasin, située à deux pas de Palexpo, abritera le futur musée. MP

    ZEP

«Rodolphe Töpffer est un peu notre papa à tous»

Zep, dessinateur

Ils en sont convaincus, le futur musée de la bande dessinée va cartonner! Il faut dire que depuis sa création en 2019, l’Association pour un musée de la bande dessinée (AMBDI) épaulée par le Canton, soit le Département de la cohésion sociale (DCS), n’a pas bullé. «On entre dans le concret, se réjouit son président, le dessinateur Zep. On a enfin trouvé le lieu.» Ce sera la Villa Sarasin, à proximité de Palexpo.

Après avoir cherché un bâtiment en Ville de Genève, l’AMBDI a finalement trouvé chaussure à son pied au Grand-Saconnex dans cette ancienne maison de maître bâtie en 1833 qui s’étend sur quatre niveaux et comprend une cuisine, une véranda et une terrasse. Le tout sur 300 m2.

«C’est un véritable havre de paix avec une forte connexion à Palexpo et plusieurs possibilités d’accès en transports en communs que ce soit en bus ou en train», explique Karine Tissot, conseillère culturelle dans le domaine du livre au DCS. De quoi ravir Michel Pomatto, maire du Grand-Saconnex: «C’est un bon choix! Cela peut permettre de créer dans cette partie du canton un pôle culturel qui aura un rayonnement régional voire international.»

Qu’abritera la villa? «Il s’agit de créer un musée de la bande dessinée au sens large. Il regroupera la BD, l’illustration, la caricature, le dessin de presse et même le dessin animé», détaille Karine Tissot.

Berceau de la BD

Un musée qui manquait cruellement à Genève. «C’est tout de même ici que la bande dessinée est née au XIXe siècle, rappelle le célèbre dessinateur genevois Zep. On a une carte à jouer. Notre objectif est de créer un lieu très ouvert sur la création contemporaine en s’appuyant sur cet ancrage patrimonial car Rodolphe Töpffer, l’inventeur de la bande dessinée, est un peu notre papa à tous!»

Nul doute que le Fonds Töpffer, actuellement géré par la Bibliothèque de Genève, qui comprend ses carnets et ses originaux, sera l’une des pièces maîtresses de la future institution culturelle.

Ouverture fin 2025

«Ce patrimoine est la pierre angulaire du projet mais, pour autant, ce n’est pas un musée Töpffer», tient à préciser Karine Tissot. Un avis que partage Zep. «Le fonds Töpffer est un élément fort pour nous mais on souhaite montrer que la BD est un art vivant. Notre chance, c’est que les artistes sont là pour en parler.» Et ils sont nombreux à Genève: d’Albertine à Tom Tirabosco en passant par Peggy Adam, Nadia Raviscioni, Fabian Menor (dessin de Une)… Autrement dit, même si le musée démarre sans collection, il y a fort à parier qu’il fourmillera d’œuvres contemporaines de qualité. «Des échanges sont possibles avec le centre BD de Lausanne, le musée de Bâle et celui d’Angoulême», poursuit Karine Tissot. Si les détails du projet restent encore à définir, il sera d’ores et déjà esquissé devant un parterre de connaisseurs le 2 décembre. Pour une ouverture fin 2025.

«Avec ce musée, l’Ecole supérieure de bande dessinée et d’illustration (ESBDI) née il y a quatre ans et les prix Töpffer (lire encadré), Genève va devenir une des capitales de la BD aux côtés de Bruxelles et d’Angoulême», se réjouit Tom Tirabosco, l’un des fondateurs de l’AMBDI.

Le Prix Töpffer remis à Catherine Meurisse

La cérémonie aura lieu le 3 décembre au campus, avenue de Châtelaine. Pour cette édition 2021, Catherine Meurisse rafle le Grand Prix Töpffer. Cette artiste prolifique est à la fois dessinatrice, autrice, caricaturiste, reporter et illustratrice d’albums pour la jeunesse. Ayant commencé sa carrière par du dessin de presse, elle intègre l’équipe du journal satirique Charlie Hebdo dès la fin de ses études en 2005. Arrivée en retard à la conférence de la rédaction le 7 janvier 2015, jour de l’attentat meurtrier, elle aperçoit les deux assaillants dans la rue avant qu’ils s’enfuient. Suite à ce drame, elle publie en 2016 La Légèreté, récit de son retour à la vie et au dessin. En 2020, elle devient la première artiste de bande dessinée membre de l’Académie des beaux-arts. Et sort en 2021 La jeune femme et la mer. Le prix consacre l’ensemble de son œuvre. Seront aussi remis le Prix Töpffer Genève 2021, qui récompense une personnalité genevoise confirmée de la bande dessinée et le Prix Töpffer de la jeune bande dessinée 2021.

Les Genevois parlent aux Genevois

Qu’est-ce qui vous ferait plaisir au musée de la bande dessinée?

Adil, maraîcher:

«J’aimerais des bandes dessinées anciennes, comme par exemple Tom Sawyer. J’aime moins ce qui se fait aujourd’hui.»

Louis, économiste:

«Des cartoons, surtout japonais! Mon fils en lit énormément, je suis certain que ça lui ferait plaisir.»

Anna, doctorante:

«Astérix et Obélix. C’est génial, ça fait replonger en enfance! Et puis la BD est un moyen fantastique de relier littérature et dessin.»

David, civiliste

«Il faut des BD pour tous les publics. En ce moment, je lis des auteurs suisses et français. Mais j’adore également les mangas.»